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SOMBRE ET PROFONDE ROSE, ANTRE D'OMBRE ODORANTE,
Ô Rose de plaisir, dont le plaisir est pleur,
Rose humide d'espoir d'une caresse errante
Sur ses bords de calice où la chair se fait fleur,

D'une eau délicieuse, ô molle Rose, enivre,
Jusqu'à l'excès divin du bonheur animal,
Un coeur fuyant l'affreuse aventure de vivre
Qui boive ce poison de son étrange mal...

Laisse fondre sur toi la lèvre favorite
Dont l'oeuvre toute tendre et sinueuse irrite
Plus, toujours plus en toi, toujours plus de douceur ;

Tandis que la beauté qui te porte palpite
Et palpitante inspire une tendresse soeur
Que son soupir appelle et qui se précipite...
© Paul Valéry
in Corona et Coronilla (éditions de Fallois, 2008) - p. 49