Stances où une dame parle
Louise Marguerite Lorraine
J'aime bien ces portraits au blanc d'une muraille,
Dont seulement l'objet émeut nos appétits,
Mais je ris de ces fous, ô la grande canaille !
Qui les peignent si grands et les ont si petits.
Ils veulent, par l'objet d'une feinte peinture,
Faire courre après eux, mais ils en sont bien loin ;
Nos cons ne suivent pas de façon la nature :
Ils ne vont point au lièvre, ils sont oiseaux de poing.
Quelque faim qui les presse en leur humeur gourmande,
L'oiseau n'est pas niais, il connaît son gibier ;
Il faut qu'il voie un poing bien garni de viande,
Si l'on veut qu'il s'abatte et rende familier.
Les Cons et les vautours ont cette ressemblance
Qu'ils se paissent de cru, et au vif ils vont tous ;
Ensemble, leur nature a cette différence
Que l'un fond sur sa proie, et l'autre fond dessous.
in Petite anthologie de la poésie érotique - établie par Thierry Leguay ( Ed. Michalon, 2002 - p. 91)