Des mots saignés pour toi
Albert-Marie Guye
Tu les auras tes mots d’amour, ma Clandestine,
Froid tu ne prendras plus à mendier dans les livres
Des mots riens que pour toi, rimes incarnadines
Qu’un jour tu appelais tendue sur moi, chagrine.
Je t’en cisèlerai d’ambre, d’airain, de cuivre,
Je t’en adouberai de fiers pour nous survivre.
Sur toi les gens diront : « Dieu ! Qu’elle a belle chance :
Lui, presqu’éteint, faut-il que vraiment fort il l’aime,
L’œil, la gorge nouée sur son chemin d’errance ;
Pour l’éblouir de chants d’une telle fragrance ;
Faire carillonner Pâques en plein carême ;
Éclater son désir en psaumes de blasphèmes
Et ne désirer rien qui ne soit son giron. »
N’embrume plus tes yeux de ce voile d’ardoise
Lorsque l’hiver s’enlise au pied de ta maison,
Se glisse sous ta robe en de mâles frissons
Et marbre tes seins de frimas couleur framboise.
Réchauffe-toi de mon souvenir, ma Turquoise !
Dors avec nos enfants-verbes conçus dans l’ombre,
Farfadets de ces nuits au doux muguet de Mai ;
Ces mille syllabes de feu, ces mille nombres,
Qu’ils t’emmaillotent, qu’ils te lovent, qu’ils te sombrent
En leurs limbes sereins aux haleines de lait,
Ces rimes-nouveaux-nés filés à mon rouet !
Tu les auras tes vers d’amour, blanche Princesse,
Ils jailliront brûlants polyspermes de sang
Goutte-à-goutte de ma palette de caresses,
Lénifiant chaque soir ton acide tristesse
Quand je ne suis plus là, que vaine tu m’attends ;
J’enfanterai des mots multiflores, changeants :
Un tapis de printemps émeraudant la plaine,
Mai qui chante un aria de fin d’après-midi,
Une abeille folette, une occulte phalène,
Un vent trousse-jupons friselisant les chênes,
La mer adamantine, un ébat de courlis,
Enfin ce que je bois dans tes yeux assouvis.
Froid tu ne prendras plus à mendier dans les livres
Des mots riens que pour toi, rimes incarnadines
Qu’un jour tu appelais tendue sur moi, chagrine.
Je t’en cisèlerai d’ambre, d’airain, de cuivre,
Je t’en adouberai de fiers pour nous survivre.
Sur toi les gens diront : « Dieu ! Qu’elle a belle chance :
Lui, presqu’éteint, faut-il que vraiment fort il l’aime,
L’œil, la gorge nouée sur son chemin d’errance ;
Pour l’éblouir de chants d’une telle fragrance ;
Faire carillonner Pâques en plein carême ;
Éclater son désir en psaumes de blasphèmes
Et ne désirer rien qui ne soit son giron. »
N’embrume plus tes yeux de ce voile d’ardoise
Lorsque l’hiver s’enlise au pied de ta maison,
Se glisse sous ta robe en de mâles frissons
Et marbre tes seins de frimas couleur framboise.
Réchauffe-toi de mon souvenir, ma Turquoise !
Dors avec nos enfants-verbes conçus dans l’ombre,
Farfadets de ces nuits au doux muguet de Mai ;
Ces mille syllabes de feu, ces mille nombres,
Qu’ils t’emmaillotent, qu’ils te lovent, qu’ils te sombrent
En leurs limbes sereins aux haleines de lait,
Ces rimes-nouveaux-nés filés à mon rouet !
Tu les auras tes vers d’amour, blanche Princesse,
Ils jailliront brûlants polyspermes de sang
Goutte-à-goutte de ma palette de caresses,
Lénifiant chaque soir ton acide tristesse
Quand je ne suis plus là, que vaine tu m’attends ;
J’enfanterai des mots multiflores, changeants :
Un tapis de printemps émeraudant la plaine,
Mai qui chante un aria de fin d’après-midi,
Une abeille folette, une occulte phalène,
Un vent trousse-jupons friselisant les chênes,
La mer adamantine, un ébat de courlis,
Enfin ce que je bois dans tes yeux assouvis.
© Albert-Marie Guye
Novembre 1979
Novembre 1979