Ah faites-moi...
Guillaume Apollinaire
Ah faites-moi feuille de rose
Prenez pitié en mon aveu
C'est une langue que veux
C'est mon cul que je vous propose
Mon cul s'éveille au souvenir
D'une inoublible caresse
Que m'enseigna une négresse
Dans un hôtel rue d'Aboukir (1)
J'avais seize ans et des torsades
La noire me jugeant à point
Régala mon cul d'un schampooing
Plus savoureux qu'une enculade
Je porte aujourd'hui les cheveux
Roulés en chignon sur la nuque
Mais j'aime encore qu'on me trouduque
Car j'ai le sphincter très nerveux
Et j'ai gardé très peu de hanches
Afin de pouvoir exhiber
Le tralala le plus bombé
Des tralalas que l'on emmanche
Et mon anus est pour le doigt
Une merveilleuse alliance
Mais tu n'es pas bègue commence
Par le baiser que tu me dois
Je sens que ta langue pénètre
Et je décharge O mon joli
Dufayel (2) paierait cher peut-être
Pour voir ce qu'on fait dans son lit
(1) dans le quartier du Sentier (dit du Caire), l'un des plus vieux quartiers de Paris qui reste encore un lieu de prostitution
(2) promoteur immobilier de l'époque
© Guillaume Apollinaire
in Julie ou la Rose (Hambourg - Paris, 1927), titre en référence à un petit roman de Mme De Choiseul-Meuse : Julie, ou j'ai sauvé ma rose (1807), qu'Apollinaire affectionnait.
in Julie ou la Rose (Hambourg - Paris, 1927), titre en référence à un petit roman de Mme De Choiseul-Meuse : Julie, ou j'ai sauvé ma rose (1807), qu'Apollinaire affectionnait.