Partager |

(sur l'air du vaudeville de la Rosière)

 

Thémire un jour dans son boudoir
Avec un disciple d'Apelle*
S'explique ainsi sur son vouloir :
Mon cher artiste, lui dit-elle,
Rendez-moi ce séjour charmant ;
Mais ne m'y faites point d'enfant.
 
Votre désir devient ma loi,
Lui répond poliment l'artiste ;
Mais que va-t-on dire de moi ?
Ah ! rien que d'y songer m'attriste :
L'on doutera de mon talent
Si je ne vous fais pas d'enfant
 
A quoi servent donc les boudoirs,
Si d'amour il n'est point de traces ?
C'est changer en sombres manoirs
Des temples parés pour les grâces :
Un boudoir fut dans tous les temps
Bien propre à faire des enfans.
 
N'insistez pas pour vos pinceaux,
Artiste qui voulez séduire ;
Vous aurez toujours pour rivaux
La taille et les yeux de Thémire :
Il lui suffira de vouloir,
L'amour naîtra dans son boudoir

* peintre de la Grèce antique

in Poésies du Chevalier De Boufflers (Imp. A. Quantin, 1886)